jeudi 15 novembre 2012

L'HÔTELLERIE À BORA-BORA






      À Bora-Bora, on n'a pas encore clôturé la mer : On peut la voir de partout,en faisant le tour de l'île.  C'est bien cela, le charme d'une île ?

     Au centre s'élève le mont "Te-Manu", (L'oiseau)  ... Mais faut-il dire que c'est mont, un pic ? - C'est un bloc de basalte poussé vers le ciel par le puissances internes .... Un roc, d'une seule pièce ... Comme un énorme doigt dressé. Il se sera solidifié là. Il est magnifique. Des oiseaux blancs, du bas en haut de la falaise, jouent au cerf-volant dans les courants d'air.



     Bora-Bora, c'est d'abord un lagon pourtant ... Un lagon qui pourrait bien ne pas avoir son pareil au monde, enserré par des îlots verts égrenés en collier ou en chaîne tout au long du récif. le bleu du large vire au violet, puis au mauve, vers l'horizon. Ligne grise du récif, et les vagues la frangent de blanc. Taches vertes des "motu" puis, à l'intérieur du lagon, toutes nuances de bleus et de verts ... Avec des taches versicolores, là où le corail affleure. 
    Souvent, un grand bateau blanc vient mouiller dans la passe : Taches rouges des bouées. 

                                        *

     Quel imbécile a voulu tirer deux vieux caboteurs au sec pour en faire des bistrots ? ... Y sont-ils encore ? Longtemps on les a laissés là, à moitié immergés ... L'un a le nez, l'autre a le derrière en l'air ...

     Il n'y a pas eu ici de Pearl Harbourg, pourtant, on rencontre ici des affûts de canons : Ils rappellent que l'armée américaine était stationnée là pendant la dernière guerre ... Mais la bataille demeura lointaine.

                                           

     Bora-Bora est maintenant la destination préférée des touristes américains et japonais, belligérants de naguère ... Mais, dans l'île, il n'y qu'une seule plage de sable blanc. 

     Bien entendu, c'est là que les hôtels ont poussé. Ils on semé, jusque dans les eaux du lagon, leurs bungalows sur pilotis : Cloisons de bambous et toits de palmes : Exotisme garanti ... Au centre du plancher, dans le salon, une vitre permet d'admirer les poissons qui passent ... 

    C'est cher, très cher ... Mais c'est bien ce qu'on voulu, n'est-ce pas ?
     Alors voilà : Sur cette unique plage de sable blanc, les natifs avaient l'ancestrale habitude de venir batifoler ... Pique-niques du dimanche, avec nattes déroulées, pâté en boite, glacières, coca-cola, bière et musique ... Autrefois, c'était plutôt le "Uru" et le poisson grillé, des fruits, du "poë".

                                           

     Il est devenu impossible de pique-niquer sur la plage, tout à fait impossible ... Trop de bungalows et trop de touristes ! ... En veux-tu ? - En voilà !

     Le natif a pris sa pirogue ... Il est allé pique-niquer plus loin : Sur les "motu", tous frangés de sable blanc ... Mais on n'arrête pas le tourisme ! ... Passerelles jetées d'un bungalow à l'autre ... Jusqu'à quatre cents mètres au-delà de la plage : Les touristes aussi, sont allés sur les îlots ! Et c'est bien là que se trouve la source du conflit ... Celui qu'on aurait pu prévoir ...

     Impossible de pique-niquer sur la plage et impossible de pique-niquer sur les "motu"...

    - " Eh ! Sommes-nous encore chez nous ?"

     Les filles, tout au long de la semaine, transportent d'une passerelle à l'autre des plateaux de boisons fraîches ... Mais le dimanche, il leur arrive de partager la colère de leur "tane" :     

          -"Sommes-nous encore chez nous ?"

mercredi 14 novembre 2012

DES LOUPS ?




    Un ... Deux ... trois ... Nous irons au bois ...

  Un parc, au Tahara : celui de l'hôtel Hyatt-Regency. 

   Panorama splendide sur la mer, les plages, la ville tout en contrebas ... Peu de promenades aussi belles ... Arbres majestueux, pelouses drues, haies fleuries d'hibiscus.

           - " ENTRÉE CINQ CENTS FRANCS "

   Mais le gardien est débonnaire : Prom'nons-nous dans les bois ...

    Il vaut mieux chanter cette rengaine-là ... Parce que l'autre ... "Les Cerises" !

     Vous me direz que les loups ...

     Justement ... Les loups !


                                

  Hall majestueux ... Gigantesque Tiki ... Marchandes de pacotille ... Publicités des "Tours operators" ... 

    Le Hyatt-Regency est un hôtel de grand luxe : Coursives interminables ... Bars en terrasses ... Boutiques : Perles, bijoux ... Toits de feuilles tressées ... Ascenseurs : Les chambres dévalent jusqu'au ras des flots !

                                *

    Dimanche ... Dix sept heures ... deux Américains à chapeaux ... Une vieille qui pousse son vieux dans un fauteuil roulant ...

   Deux ou trois couples de Japonais tout propres ...
   Au bar, une vahine lente et silencieuse ...

  Japonais et américains ont glissé sans bruit ...


 Fauteuils en rotin ... Thé ... porcelaine bleue ... Petits pots ... eau chaude ... sachets de mousseline et leur ficelle qui pend sur le côté ... petits gâteaux au beurre.


                                   

  - " Loup y es-tu ? ... M'entends-tu ?"

  Justement : d'où sort-il, celui-là ? 

  Gendarme avec son képi ? ... Pistolets dans leurs étuis ... Parka ... pantalon noir, noir ... C'est comme à la Télé ! ... G.I.G.N. ! ... Gendarmes mobiles ...

   Un peloton de véhicules est caché derrière les buissons ... 

         - " Ils arrivent par l'ascenseur !"


  Prise d'otages ?  Attentat ? ... Rainbow-Warrior ? 

  On imagine un commando : Sous-marin au ras des sables ... Ils sont équipés de postes de radio portatifs ... 

  Mais enfin ! Que se passe-t-il ? ... Il y en a combien ? ... Logeraient-ils dans l'hôtel ?

 Des loups, vous dis-je ! 


                                  

  Mais tu sais bien : Les gardiens de prison sont en grève ... On aura fait venir ceux-là pour parer à toute éventualité ...

 Il n'y aura pas de drame. Ils repartiront sans que personne ne parle d'eux : Ils ont glissé ... Mais je n'ai pas rêvé ... Et c'est cela aussi, Tahiti !

   POUR LIRE D'AUTRES TEXTES, CLIQUER SUR LE MOT ÉCRIT EN ROUGE

DELTAPLANE







   Un mousqueton ... Ce n'est rien ... Ou pas grand'chose : 

                  Un petit crochet en acier inoxydable ...

                                   
      Il a couru ... ses ailes bariolées étaient déployées. Il s'est élancé dans le bleu du ciel, face au bleu des flots ... 


      Il a pris son vol ... On l'a acclamé. 

      Il avait oublié d'accrocher le mousqueton qui devait retenir le harnais ...

       Il a tourbillonné ... Il a lâché.

                                   
       Il gît quatre cent mètres plus bas, le corps disloqué sur les goyaviers.

        Il gît ... L'homme-oiseau. 

      Ce n'était pourtant rien : Un mousqueton ... rien qu'un petit crochet en acier inoxydable ...

lundi 12 novembre 2012

INSCRIPTIONS ET BELLES LETTRES





               Bob en rit encore, je pense ... C'est la meilleure affaire de sa vie !

            Il avait acheté, pour une livre australienne, de moitié avec un compère français ... Un îlot du Pacifique, portant le nom de Mattew, (prononcez Mattew, comme il se doit !). 

            C'était la meilleure affaire de sa vie parce que, depuis, le volcan ayant explosé, la superficie de l'îlot avait doublé.

             Au pied de ce volcan, il y a une plaque scellée au rocher : Plaque de cuivre gravée ... De temps à autre, la France détourne par là quelque navire pour confirmer son titre de souveraineté. Sans doute, alors, sonne le clairon ...



                                 


        À l'autre bout du même océan se trouve un mince anneau de corail inhabité ... Clipperton fut longtemps, et on ne sait pourquoi, disputé entre le Mexique et la France. En mille neuf cent trente cinq il fut attribué à la France par arbitrage ... Du Roi d'Italie !

         Sur Clipperton aussi, on a scellé une plaque. Là aussi, sans doute, le clairon sonne de temps à autre, effrayant les sternes et les fous ...

                                    *

       L'histoire nous apprend ce que valent ces plaques gravées et combien le temps en arrache ...

       Il me paraît que plus le titre est contestable, plus grand est le désir de l'attester !

                                   *

   À Tahiti, on en trouve partout, des plaques gravées ... Histoire de faire ressortir les liens que l'on a voulu nouer et que le temps dénouera probablement un jour ou l'autre ... Là comme ailleurs !

    Rien que sur le quai de Papeete, on trouve un monument à la gloire de la France Libre ... On rencontre ensuite une plaque reproduisant le texte de la citation à l'ordre de la Nation des "Poilus tahitiens". On trouve aussi une plaque évoquant la citation des "Combattants Tahitiens de la Seconde Guerre Mondiale" .... J'allais oublier le buste de Monsieur de Bougainville, trônant entre deux canons ...Il y a encore une autre plaque scellées par les Chinois pour rappeler l'arrivée à Tahiti de leurs ancêtres ....

    Manière encore de rappeler "ses droits" ... Le Monument aux Morts de la Guerre de quatorze n'est pas très éloigné, couvert de noms tahitiens ...

    Dérision ?  ... Une plaque apposée près d'un bistrot rappelle que "Jo Dassin, célèbre chanteur français est mort à l'étage au-dessus ...



                             

      À la Pointe Vénus, au bord de la plage, il me souvient qu'on avait gravé sur de gros troncs d'arbres les noms des "Grands Navigateurs" européens .... Je n'ai pas retrouvé ce troncs ... Peut-être ai-je mal cherché ? ... Mais, tout aussi bien, un cyclone les aura emportés ? 

     Prophétie ? - Sur le monument commémorant le passage du capitaine Cook, la plaque gravée a disparu ...

     Les plaques gravées se fendent, s'arrachent, disparaissent ... Les grands hommes passent et puis trébuchent .... Les drapeaux changent tout en haut des mâts ... Les clairons se taisent ... C'est toujours le temps qui finit par avoir raison : Le temps ... Le vent ... l'Océan !

dimanche 11 novembre 2012

LES BATEAUX






         En mille neuf cent quatre vingt cinq, si mes souvenirs sont bons, une pirogue double baptisée Hokulea , franchissait, venant de Tahiti, la passe de Raïatea. Elle repartait vers les îles Cook, puis vers la Nouvelle-Zélande ... Qu'elle atteignit en bon état.

        Il est regrettable qu'après son retour, on l'ait laissée pourrir à côté du Musée ...





                                  

        -" Entrer dans l'avenir à reculons !"

        Une seconde pirogue double est actuellement en construction sous un hangar, taillée dans le bois de cèdre de la Californie. Ses bordés sont cousus à la manière d'autrefois ... Les capitaux engagés sont américains ... 

       On prie pour que ne lui donne pas pour nom "Coca-Cola" ... Mais qu'aurions-nous à redire, nous qui baptisons nos bateaux "Paul Ricard" ou "Fujicolor" !

       Les Polynésiens commémorent leurs ancêtres, "arrivant aux îles avec leurs dieux, leur langage et leurs cochons "... Pourquoi leurs parrains ne seraient-ils pas "Bagages Superior" ou "Fleury-Michon" ? 

                               *

        On sait que les pirogues polynésiennes allèrent jusqu'aux glaces de la Terre de Feu et, d'un autre côté, jusqu'à Madagascar !


        Mais cela ne me dit toujours pas si les Polynésiens ont peuplé l'Amérique ... Eh ! Pourquoi pas ? - Il y a des arguments en faveur de la thèse ...

 POUR LIRE D'AUTRES TEXTES, CLIQUER SUR LE MOT ÉCRIT EN ROUGE.

À BOIRE !



   Il y a des enfants heureux ...
   Il y a des enfants déshérités ...
   Il y a des enfants gâtés ... Ils vivent dans les îles et Ils ont décidé une fois pour toutes qu'ils étaient au Paradis. 

                                  *

    Les enfants gâtés, ça boude, ça fait la moue, ça tape du pied.

                                  *

    J'ai vu, en certains endroits de ce vaste onde, transporter l'eau dans des cruches sur la hanche ou sur la tête, dans des bambous sur l'épaule ... Dans des bidons aux extrémités des fléaux ... Dans des peaux de biques portées en bandoulière. 

   Et puis j'ai vu espérer, espérer longuement, espérer la pluie ...

                                    *

    En Polynésie, les îles hautes ont de l'eau. Encore faut-il la capter et l'acheminer ... Ce n'est pas toujours facile à travers roches et vallons. Mais l'eau a toujours été considérée comme un don des dieux .... À ce titre, inépuisable et gratuite. Elle est devenue banale et donc sans valeur ...

                                    *

    Dans ma mémoire, le Tahitien a toujours été un homme avec un tuyau à la main : Soit il arrose le béton quand il fait chaud, soit il inonde ses fougères le soir venu, pendant des heures ...

                                     *

    Il lui faut bien, aujourd'hui, reconsidérer les choses : Le Paradis n'est plus ce qu'il était ! ... Captages, réservoirs, conduites ... Compteurs !


                                    

   Bora-Bora n'est pas d'accord : Le Paradis, c'est gratuit ! ... Et c'est gratuit pour l'Éternité !

   Aujourd'hui, les gendarmes sont obligés d'accompagner les agents chargés de fermer les compteurs des mauvais payeurs !

    Mauvais payeurs ? - Pas payeurs du tout ! ... On ne veut plus payer !
Et ... Puisque la Société des Eaux veut nous faire payer ... Nous allons la faire payer !

   Plainte est déposée : - " Elle a fait passer les conduites à travers nos haies !"
... On vous les disait : Les enfants gâtés tapent du pied !

     C'est égal ... On en connaît qui voudraient bien payer pour voir couler l'eau des tuyaux ! ... Parlez-en aux paumotu !

POUR LIRE D'AUTRES TEXTES, CLIQUER SUR LE MOT ÉCRIT EN ROUGE

vendredi 9 novembre 2012

MIGRATIONS ET LONGUES ERRANCES



         Ils venaient du Pérou, portés par les alisés dominants ... Ou bien ils arrivaient des rives asiatiques ... Ils intriguaient, les Polynésiens.

    D'autant que l'on savait que, pour leurs longues navigations, ils ne possédaient que des pirogues ... Mais quelles pirogues !

     Le Capitaine Cook eut le bonheur de voir les dernières : L'une d'entre elles mesurait quarante mètres ... Pirogue double, portant cent quarante quatre pagayeurs et trente neuf guerriers !




                                   

      Depuis Wallis, tous les Européens ont considéré le peuplement de l'Océanie comme un mystère ... Nous savons maintenant qu'il partit des environs de l'Insulinde. Les migrations ont ricoché au fil du temps, d'île en île, en longeant les côtes de Nouvelle-Guinée, le Nord du Vanuatu, occupant les archipels Gilbert et Ellice, gagnait Raïatea, aux Îles sous le Vent au deuxième siècle avant Jésus-Christ. Elles ont ensuite peuplé les Marquises puis sont reparties, au septième siècle vers Hawai et la Nouvelle-Zélande, (Sans compas ... Et cette seule idée peut laisser pantois !) 

        Les Maoris atteignent l'Île de Pâques au douzième siècle ... À plus de dix mille kilomètres de leur lieu d'origine ...

                                   

           Les vaisseaux européens, à la même époque, auraient été bien incapables d'en faire autant ...

           Thor Heyerdahl a voulu démontrer que les Polynésiens venaient de l'est ... Éric de Bishop prétendait prouver qu'ils venaient de l'Ouest ... Des pages et des pages ... En un peu plus de deux cents ans ont été noircies d'hypothèses, de supputation, d'affirmation contradictoires ... Jusqu'aux fantasmes les plus extraordinaires, évoquant des migrations de tribus venues d'Égypte, (pas moins !) ou des continents engloutis (Et l'on reparlait d'Atlantides !)  ...

      Les fantasmes aident à vivre ... Il est vrai que, d'aventure, certain par merveille, prennent corps !



                                  

       Parlant des Polynésiens et de leurs difficultés actuelles à prendre pied dans le modernisme, certains parlent de races en voie de dissolution , et même de races "avilies" ... Il faudrait regarder de plus près au concept de race, tant en ce qui concerne les recouvrements successifs, qu'en ce qui concerne l'état actuel des peuples des îles.

     "Ces peuples entrent dans l'avenir à reculons" 
- Il est vrai que l'on voit renaître, telle celle du tatouage, des pratiques disparues ... Mais, par delà le cordon de bouteilles vides formant récif, il faut voir ici recherche d'identité et de fierté ... Il n'importe, que l'aventurier porte de nos jours patronyme européen, qu'il ait la prunelle et la peau plus ou moins claires ...


                                  


Pour lire d'autres textes, cliquer sur le mot écrit en ROUGE.

     

LE URU OU ARBRE À PAIN







              C'est une feuille palmipartite (Voir le Larousse ...)

       On penserait un peu à celle du platane, mais elle est d'un vert de bronze bleuté, cinq fois plus large que celle du platane et, finalement beaucoup plus belle ...

        Une banque en a fait son emblème : La feuille recouvre le fruit. Ce dernier est vert, gros comme un melon de belle taille, pâli de jaune lorsqu'il vient à maturité.  

         L'arbre est fort, droit, élégant, équilibré. En langue française, on n'a su lui donner d'autre nom que celui d'arbre à pain ...




                                

         Le fruit, en effet, est farineux. On le cuit sous la braise, ou bien à l'eau. Il peut être mangé ainsi et, ma foi, je le trouve fort bon. On peut aussi le piler et le laisser fermenter au fond d'une fosse. La pâte ainsi obtenue se conserve très longtemps. Les anciens Tahitiens en faisaient des réserves pour leurs pérégrinations entre les îles. On trouve de ces fosses jusque dans les atolls des Tuamotu : Autant de garde-manger pour piroguiers errants !

                                  *

      Un fruit, compact, lourd, gros comme un melon  ... Cela peut faire très mal, quand cela tombe de haut  ... Mais sans doute ne tombe-t-il, comme la noix de coco que "sur la tête des imbéciles " ... Rassurez- vous !

BOTANIQUE





   Un grand arbre secoue par grappes les cosses sèches de ses gousses vides ...

    En d'autres îles, créoles celles-là, les mêmes cosses caquettent de semblable manière ... Là-bas, on nomme cet arbre "Langue-Belle-mère" !

   Je ne sais le nom que porte ici cette sorte d' acacia ...


                                 *


     Pourquoi cet arbre, voisin, a-t-il reçu le nom de "fromager" ? - Je ne vois là aucune évidence ... Par contre, on le nomme aussi kapokier ... On l'identifie sans doute mieux ainsi. 

    Il se dévêt de ses feuilles lorsque les fruits sont mûrs. On croirait alors un arbre mort. La coque du fruit se fend en deux barquettes et libère une ouate dont le vent disperse les flocons ... C'est ainsi que se dispersent les graines.


                                    *


   Un poète a fait éclore aux branches des arbres, sur les pentes de la vallée de Tipaerui, des tulipes rouges par milliers.

   Nous avons bien besoin des poètes : C'est au fond de cette vallée que s'entassent les ordures de la ville ...


                                     *

     En d'autres archipels, plus britanniques, l'arbre que nous appelons ici le "flamboyant" se nomme "Christmas tree" ... On devine pourquoi : C'est qu'il fleurit à Noël.

      Je cherchais l'autre jour, près du temple d'Afareaïtu, sur l'île de Moorea, la parasol splendide que la Nativité embrasait naguère ... A-t-il été victime de quelque cyclone ?




                                    


    Sur une plage de sable noir sont écloses des étoiles très étranges : Pompons de filaments violets à extrémités dorées, comme illuminés ... Posés sur corolles blanches. 

    Les feuilles de l'arbre dont elles ont chu sont larges et rondes. Le fruit a la forme 'une barrette de curé ... On l'appelle  le "Bonnet carré".

jeudi 8 novembre 2012

LE COLLÈGE FLOTTANT









   Certaines choses surprennent et peuvent laisser rêveur ...

  Chers enfants, dont on ne sait plus par quel bout il faut les prendre ... Chers enfants dont personne ne s'aviserait plus de tirer l'oreille et encoremoins de botter les fesses ...

 Chers enfants qu'il faut cajoler, entourer, dont il faut ... analyser les incartades et les erreurs; ( qui ne sont plus des fautes !) ... Il est vrai que nous ne savons plus très bien nous-mêmes où est le Nord et où sont les points d'équilibre ...

                                    *

  Un bateau est dans le port aujourd'hui : Un bateau bleu à coque en acier ... Trois mâts, dont un gréé de voiles carrées, les autres de voiles auriques ... Coque profonde, cabines hautes. Il bat pavillon des Bahamas ... On sait ce que cela veut dire ... Tout en haut du gréement bat un pavillon de courtoisie aux couleurs de la France ... Sur tribord flotte un pavillon canadien.

 C'est un collège flottant. Il a embarqué je ne sais combien d'adolescents canadiens qui poursuivent leurs études en sillonnant les mer et les océans.



                                   

  Chers adolescents ! ... L'embarquement ne coûte jamais que deux millions ;.. De Francs Pacifique !

   Ayons une pensée pour le Père Jaouen, qui embarquait de jeunes pré-délinquants pour leur permettre de "faire le point"... Son navire est en train de pourrir dans un coin de quelque bassin ... Faute d'argent ... Ceux-là sont plus heureux : Tant mieux, tant mieux !

  Je ne sais qui ils sont ... Je ne sais ce qu'ils sont ... Tout à l'heure, au beaupré, une jeune fille semblait faire ses devoirs ou apprendre ses leçons. Deux autres revenaient d'une promenade à terre ... Elles avaient des anneaux dans le nez ...

                               *

 - Mais qu'allez-vous sous-entendre là ? - Surtout, ne le dites pas ! ... On vous accuserait de "racisme anti-jeunes", pas moins ! ... Et tant pis si l'expression vaut son pesant de barbarisme ! ... Pourquoi juger, d'ailleurs ? - Ne suffit-il pas de songer ?


UNIVERSITÉ FRANCAISE DU PACIFIQUE



La République installe ses "miroirs aux alouettes". Elle tend aussi les ressorts et tire les ficelles ... L'Université Française du pacifique relèverait de ce genre d'épate. En tout cas, elle coûte très cher ...

                                   *

  Elle s'efforce d'attirer les étudiants et les enseignants et les étudiants des pays voisins et elle les entretient fort bien. 


                                   

 Il doit s'agir de calmer les retombées des clameurs d'opposition à nos essais nucléaires, ou bien s'agirait-il de faire oublier les maladresses de nos agents "très spéciaux" en Nouvelle-Zélande ?

 Il faut bien , en tout cas, essayer d'amadouer des voisins qui ne nous aiment guère ...

                                  *

  Mais l'université a un autre rôle : Elle permet, par exemple d'offrir en ce mois d'avril, qui est fort pluvieux en Europe ... Elle permet d'offrir aux amis de très exotiques promenades ...

   Me dira-t-on pourquoi il était nécessaire de faire venir à Tahiti un professeur ... émérite, n'en doutons pas ! ... Et me dira-t-on pourquoi il était indispensable que ce professeur, de sexe féminin, fût accompagné de son mari ...

                                    *

  Hautement indispensable, la tenue d'une conférence sur le thème de ... L'adjectif qualificatif dans la phrase française !

 Les professeurs de l'Enseignement Supérieur ignoraient vraiment qu'il était plus économique de dire : " Un cheval grand et noir  qu'un grand cheval noir !"


 Comment faut-il dire exactement : "Un individu grand, fort et bête" ou bien "un grand individu, fort et bête" ?

  Monsieur Jourdain eût mérité son billet d'avion ... Et, peut-être bien encore un autre billet pour son épouse ou sa servante ...


mercredi 7 novembre 2012

TE NATURA






   Gardons-nous des polémiques : Nous connaissons rarement les tenants et les aboutissants ... Restons-en aux constats !


     Un matin, vous vous réveillez dans une ville empuantie, qui le restera pendant des jours et des jours ... Les associations de protection de la Nature ont dressé barrage sur le chemin d'accès à l'usine d'incinération des ordures ménagères, dans la vallée de Tipaerui ... On veut obliger l'usine à fermer pour en faire cesser les fumées. 

   L'usine est toute neuve : Elle a été inaugurée il n'y a pas deux ans ! ... N'importe !

   Il n'importe pas non plus que les ordures s'accumulent aux coins des rues !



                                 

     Certain chercheur du très officiel Office de la Recherche Scientifique a trouvé, clame-t-il, la solution : Qui disait que les chercheurs étaient payés pour chercher, mais pas pour trouver ?

   Celui-là nous propose d'immerger les détritus ménagers au fond des océans !

   Quand on vous le disait, qu'il y en a qui font tout de même des trouvailles !

                                   *

   Un autre matin, vous vous réveillez au bruit des tronçonneuses, pas moins !

    Les employés de la Mairie sont en grève : Ils se manifestent en coupant les arbres au ras du sol, tout le long des boulevards ... Les plus beaux arbres sont à terre ... La circulation automobile est bloquée. 

  On ne connaîtra pas exactement les raisons de cette grève, mais ... C'est gagné, paraît-il : Les négociations ont repris !

 Il faudra bien cent ans pour faire repousser des arbres pareils !



                                 

  - "Il faut comprendre ... Dit le responsable des associations de protection de la Nature ... 

   Le porte-parole des syndicats grévistes affirme lui, que "C'est un acte réfléchi et responsable" !

   Ce ne sera pas la première fois que l'on évoquera le "blocage de la société" et le "Gouvernement des médias" ... On n'y usera pas sa plume ! ... C'est pourtant une bien mauvaise commédie de boulevard !

    Coincidence ? - Le même jour, au Petit Théâtre de l'O.T.A.C. , on donnait une comédie intitulée "Ne coupez pas mes arbres" ...

... Les affiches n'auraient-elles pas donné des idées à quelqu'un ?


POUR LIRE D'AUTRES TEXTES, CLIQUEZ SUR LE MOT ÉCRIT EN ROUGE.

LES GRANDS SCIENTIFIQUES










       Un atoll est un mince anneau de corail entourant, au ras des flots, un lagon bordé de plages blanches.

    Le plus souvent, une brèche permet aux bateaux de pénétrer dans les calmes eaux intérieures. On se ferait difficilement une idée de la merveille des gammes de bleus, de violets, et de verts qui s'exaltent là.

  Dans les Tuamotu, les élevages d'huîtres perlières  occupent les lagons. Là se trouvent également les réserves de poissons, essentielles à la survie des hommes. 

  Rien ne pousse, en effet, sur ce gravier corail mort, en dehors des bouquets de cocotiers. Rien ne vit, à l'exception de quelques poules, quelques cochons, des chiens ...

                                        


                                 


   Or, en cette année particulièrement chaude, la température des eaux intérieures s'est élevée. L'inquiétude est grande. Les lagons changent de couleurs : Les bleus virent au vert ... Les algues microscopiques prolifèrent. Par touffes, les coraux meurent et blanchissent. 

                                      *

    Les habitants de l'atoll d'Hikueru appellent au secours : Les poissons de leur lagon meurent par milliers ... Les grands poissons pélagiques eux-mêmes meurent aux alentours de la passe : Bonites, thons, thazards ...

    Personne n'a encore fait allusion aux explosions atomiques de Mururoa, mais ... Sait-on jamais !

    Une "mission scientifique" s'affaire ... Elle a prévenu, déjà qu'elle "ne pourrait rien faire pour refroidir les eaux" ... On s'en serait douté !

mardi 6 novembre 2012

LES GRANDES STARS




         Elle est venue ... On l'a vue, la chanteuse, la grande chanteuse ...

        On l'a vue, toute simplette : paréo et souliers plats ... Puisqu'on vous le dit !

        Elle a fait le tour de ses amis. On l'a vue, même, dans une épicerie ...

       Depuis quatre années, elle est propriétaire d'un îlot sous les cocotiers : Que voulez-vous ... Il y a des enfants qui restent des enfants ...

        C'est Diana Ross ... Elle est venue fêter son cinquantième anniversaire dans son royaume au-milieu du lagon de Raïatea ...

                                *

      À Tetiaroa, il y a Marlon Brando. À Bora-Bora, il y a Paul-Émile Victor. Julio Iglesias était à Huahiné. Jo Dassin était à Tahaa. Il y avait Jacques Brel à Nuku-Hiva .... Il y a ... Il y a beaucoup d'enfants qui ont rêvé d'une île ... Certains même y ceignirent couronne ... en papier doré !

                                 *

     Diana Ross, me dit-on, est une grande, grande chanteuse noire américaine. Pour cette fête, elle est arrivée je ne sais d'où, je ne sais comment ... Elle avait beaucoup d'invités ! ... Quincy Jones, paraît-il ... Et beaucoup d'autres que je ne nommerai pas, ne fréquentant guère les salles de concerts ...

     Tout ce beau monde a logé à Huahiné ...   Que voulez-vous  : Un îlot, c'est tout de même tout petit !
                    
                                  


     À Huahiné, il y a un hôtel tout à fait exceptionnel : C'est cher ... Très cher même ... Mais c'est très chic ! ... On a son lit dans une cahute de luxe perchée dans les branches d'un arbre !

    On vous le disait ... On vous le disait ... Il est des enfants qui ne grandiront jamais !

     Au matin, tout le monde a embarqué sur des "yachts de luxe" (En location pour un million par jour ... Un million "Pacifique" s'entend bien ...)

    Il y avait trois yachts ... À un million chacun !

                                   *

    On traverse le lagon qui sert d'écrin à Raïatea et à Tahaa ... C'est superbe !

     On ressort par la passe de Miri-Miri ...On rejoint l'îlot de Diana Ross. 

       C'est tout simple, on vous le dit : Des Polynésiens au torse nu font sonner les conques. Des enfants chantent et dansent. Des tambours battent le Tamouré ... Tout le monde est paré de colliers de fleurs ...

        Très Nouvelle-Cythère ... Digne de Bougainville !

         On vous le dit ... On vous le dit : Trois siècles plus tôt, Diana eût été l'amie de Pomaré ... Le repas fut digne celui des Arii.

                                *


      Quand on vous dit, qu'il y a des enfants qui n'ont jamais grandi !

       Au soir venu, tout était fini.

                                 *


                                  



 L'idiot m'a dit : 

                   - "Mais, ce n'était rien d'autre, à grands frais, qu'un pique-nique sous les cocotiers !"


POUR D'AUTRES TEXTES, CLIQUEZ SUR LE MOT ÉCRIT EN ROUGE.

LES TOURISTES JAPONAIS







                                                                    






                 Il n'est pas vrai de dire que les Japonais sont jaunes. Ou bien il faudrait penser qu'ils pâlissent en s'éloignant de leurs îles d'origine ...

        On connaît des fleurs qui s'affadissent ainsi ...


                                  *

       Les Japonaises que je rencontre à Papeete sont très pâles et tout de blanc vêtues, depuis les chaussures jusqu'au petit chapeau-cloche. Pour ce qui est de leur visage, on songe céruse ...


                                  *


        Elles pépient devant les vitrines, comme des enfants de Marie en balade ...

         Leurs compagnons les suivent, harnachés de courroies, portant sacs et caméras ...

lundi 5 novembre 2012

L'EXIL À DOUZE ANS




YVETTE




        Elle a des yeux, mon cher ! ... De ceux dont on dit qu'ils roulent comme des boules de billard ... Expressifs !

   Ce n'est pas une beauté, mais c'est une femme qui pétille de dynamisme, d'intelligence et d'humour ... Elle raconte :

                                  *

  - " Je suis née à Huahine, sous les cocotiers. J'ai pataugé dans le lagon. Tous les dimanches matin on me mettait une robe à volants et je partais vers le temple, mes chaussures à la main ...

      Et puis on me met en pension à Papeete... C'est déjà une capitale ... Je m'y fais.

    Alors voilà : J'ai douze ans. Il paraît qu'il faut que je poursuive mes études en France. Comme je sors du collège protestant, on m'envoie à Strasbourg ... C'est où, Strasbourg ? ... Et puis, j'ai un peu peur de ne rien comprendre là-bas : Je sais très bien qu'en France, on ne parle ni le Tahitien, ni un véritable Français comme je le connais. 

    Un "véritable Français" ... Tu parles ... Quand j'ai passé mon Certificat d'études, à Papeete ... Le professeur qui lisait la dictée ... On ne comprenait rien à ce qu'il disait ! - Quand j'arrivais à identifier un mot, je l'écrivais à la hâte et je laissais tout le reste en blanc, avec l'espoir de comprendre mieux à la relecture ... Nous qui étions habitués à des intonations standard et à des prononciations nettes, détachant bien les syllabes ... Les copains, dans la salle, me faisaient des signaux désespérés : J'étais la plus dégourdie, c'était donc moi qui devais expliquer ce  qui se passait ... Je lève le doigt ... j'explique ... Le professeur éclate de rire ! - Nous avons repris la dictée avec quelqu'un qui parlait vraiment le Français ... Le nôtre !


    Quand elle raconte, ses mains sont extraordinairement mobiles. Tout le visage est expressif : Les sourcils se lèvent ou se froncent, les narines palpitent, les yeux, les lèvres ... Une vraie conteuse professionnelle !



                                 

    - " Alors, tu comprends : j'ai douze ans ... Me voilà dans l'avion ... Bon, l'avion, ça va ! On m'en a tant parlé que je ne suis pas impressionnée : Je sais que quelqu'un va m'attendre à Paris ... Mais c'est qu'il y a une escale à Los Angelès! Il faut descendre de l'avion, entrer dans l'aérogare, passer des contrôles ... 

      Tu regardes bien : C'est fléché ! Tu suis les panneaux sur lesquels il y a marqué "Transit" ... Tu ne peux pas e tromper !

      On monte dans un autobus ... j'ai une valise dans une main, un sac dans l'autre ... Ne pas les quitter : - " Tu risques de te les faire voler !"

      On me donne un ticket et ... Transit ! ... C'est bien : C'est par là ! ... Couloir ... Un long couloir, sans fenêtres, éclairé par des lampes invisibles ... Moquette par terre : Je marche sur la pointe des pieds ! ... Un virage à droite, presque à angle droit ... Un autre virage, long, long ... Le couloir !

     Plus de panneaux ... Affolement ! Le Monsieur qui est devant moi : Il parle Français ...Il va donc à Paris ! Je suis le Monsieur ... Il marche vite. J'accélère ... Pas une seconde je n'ai pensé qu'un Français puisse descendre à Los Angelès !

   Nouveau virage du couloir ... Plus de Monsieur !

   Je suis au pied d'une espèce d'escalier dont les marches montent toutes seules jusqu'à l'étage au-dessus  ... Mon Monsieur est tout en haut ... Comment faire pour monter sur ces marches qui défilent ?  - J'ai les deux mains occupées par mes bagages ... La rampe défile elle-aussi ... Je saute à pieds joints : Me voilà partie !

  Mais à l'arrivée ?  ... À l'arrivée, je me prends les pieds dans mon sac et dans la valise : Je culbute ... J'arrive à plat-ventre ... Mais j'arrive ! 

 - Et mon Monsieur ? 

  Il est là. Il passe une porte en verre, tout au bout du couloir ... Je cours. 

  J'arrive : Il n'y a plus de porte ... Il n'y a pas de poignée ... Il y a seulement une cloison de verre, continue. Pourtant, mon Monsieur est passé, lui ...
Je le vois à travers la vitre. 

  Arrive une dame ... La vitre glisse et s'ouvre. La dame est passée ! ... Tout se referme en silence. 

  - Mon Monsieur ! ... je vais le perdre ... Je fonce dans la vitre ... Je baisse la tête et je protège mon visage avec mon bras ... 

 La vitre s'est ouverte ! Je ne sais pas comment ...

C'était en mille neuf cent cinquante sept ... J'avais douze ans et j'allais à Strasbourg ...

Pour lire d'autres textes, cliquez sur le mot écrit en ROUGE.